Production Maintenance n°43

Milieux hostiles

Milieux hostiles Technologie Expertise Milieu hostile : l’expérience d’un acteur de l’inspection industrielle Les industriels se posent tous la même question : combien de temps va fonctionner leur installation ? Cette interrogation concerne la santé de dizaines d’éléments, à commencer par les moteurs, les roulements, les transmissions et leurs différents composants, les tuyaux ou les vannes, les systèmes d’étanchéité, etc. mais également la matière et tout ce qui concerne les soudures. C’est là qu’interviennent les équipes de Frédéric Schaditzki, directeur de l’activité Inspection des matériaux au sein du groupe DEKRA Industrial en France. Le service Inspection des matériaux de DEKRA Industrial s’adresse pour l’essentiel à l’industrie manufacturière et l’industrie lourde ainsi que le nucléaire et les activités liées à la gestion de l’énergie. « Nous touchons aussi d’autres secteurs industriels tels que l’automobile, l’industrie pharmaceutique ou encore l’agroalimentaire, c’est-à-dire partout où il y a des process, ajoute Frédéric Schaditzki. Notre métier, l’inspection des matériaux, est associé à un domaine très réglementé sur les process et les équipements sous pression. Cette réglementation européenne est régie par les DREAL ». Ces secteurs d’activité présentent des dangers inhérents à leur environnement, aux matières, aux gaz et aux matériaux qui y sont travaillés, le tout associé à des exigences de délais de plus en plus fortes de la part des clients. Ces milieux dans lesquels évoluent les intervenants de maintenance sont-ils pour autant considérés comme hostiles ? « Chez DEKRA Industrial, nous sommes particulièrement sensibles à la sécurité et à la prévention des risques, rappelle Frédéric Schaditzki. Il s’agit pour nous d’une vraie culture d’entreprise. Dans le domaine de l’inspection des matériaux, nous passons beaucoup de temps sur des sites à risques, comme les sites pétrochimiques, nucléaires etc. Nous devons systématiquement anticiper et préparer le plus en amont possible les plans de prévention qui s’appliqueront avant et pendant l’intervention de maintenance afin d’assurer toutes les exigences du client et un haut niveau de sécurité ». Pouvoir intervenir partout Intervenir partout, c’est d’abord accéder à © Moretrench des espaces confinés, dans des tuyauteries par exemple, dans des excavations, en altitude, dans la boue et par tous les temps, sans oublier que l’on ne connaît pas l’usine dans laquelle on doit travailler. C’est pourquoi, il est essentiel de mettre en place un plan de prévention, à la fois signé par le client et les éventuels sous-traitants. Le mieux est-il encore – Un robot pour inspecter les cuves Lors d’opérations lourdes de production d’électricité ou plus généralement dans l’industrie, il est indispensable de mettre à disposition des équipements d’inspection innovants et rapides. DEKRA a mis au point l’an dernier une solution unique d’inspection des cuves : des robots commandés à distance. Ils portent des noms du type « Skidbladner » ou « Gungner ». Ces robots sont pilotés à distance depuis la salle des commandes de la centrale nucléaire. L’automate entame l’inspection de la cuve du réacteur à la recherche du moindre signe de dommages, de fissures ou de corrosion. Un autre inspecte l’état des soudures à l’aide de procédures optiques et non destructives. Temps d’inspection divisé par deux Les données recueillies sont remontées via des gros câbles de connexion jusqu’aux ordinateurs des spécialistes DEKRA fournissant ainsi une image détaillée de l’état de la sécurité de la cuve. Au final, toutes les soudures des cuves, y compris les piquages et les piquages en fond de cuve, ont été inspectées en cinq jours au total, soit deux fois moins de temps qu’habituellement. Pour Frédéric Schaditzki, « c’est une nouvelle étape pour DEKRA Industrial France qui ouvre ainsi une nouvelle voie dans la vision du futur des contrôles robotisés sur les segments industriels et énergétiques nucléaires français. » Pouvant descendre jusqu’à huit mètres de profondeur, ces robots subaquatiques améliorent la qualité et la précision de l’inspection. Inaugurée dans la centrale nucléaire suédoise de Ringhals, cette solution développée par DEKRA a conquis les centrales de Beznau et Mühleberg en Suisse. PRODUCTION MAINTENANCE NOVEMBRE 2013 PAGE 28

lorsque l’on dispose de suffisamment de ressources en interne – de dédier une personne uniquement chargée de rédiger le plan de prévention. Afin de le préparer au mieux, il convient avant tout de bien identifier la mission, les zones qui y sont associées, les équipements et les produits utilisés, mais également la co-activité des autres personnes travaillant sur le même site et à proximité de la zone d’intervention ainsi que les horaires de chacun. Il faut donc bien analyser l’environnement pour déterminer quels profils seront les plus à même d’intervenir ; « outre les formations obligatoires liées aux sites à risques comme les usines de chimie, ou encore la formation en hauteur, nous avons pris soin d’aller plus loin en formant nos collaborateurs aux interventions sur corde. Même s’ils seront amenés à ne l’utiliser qu’une fois dans leur vie, peut-être même jamais, ils sont aujourd’hui prêts à intervenir absolument partout ». Des moyens technologiques en support du management L’inspection des matériaux est de fait une activité potentiellement risquée en raison des produits utilisés dans les opérations de ressuage par exemple. De plus, l’analyse par rayons X tout comme la photographie à rayons X ou gamma présentent des dangers nécessitant de délimiter une zone de « tir » bien isolée. Il est dès lors essentiel d’équiper tous les opérateurs des équipements de protection individuelle et collective adaptés à la fois à leur métier, à leur corps et à la nature de l’intervention. Outre les plans de prévention, l’organisation des hommes et de la zone d’intervention, des solutions technologiques existent. Les installations sur lesquelles on intervient sont souvent de nature complexes et nécessitent des équipements pointus, soumis à des suivis réguliers et réglementés pour être conformes en termes de calibration par exemple. « Dans notre domaine, nous assistons depuis quatre ou cinq ans à un véritable pas en avant. Nous sommes en effet passés de systèmes unidirectionnels à des solutions capables de contrôler un ensemble entier ». Ces nouvelles solutions sont essentiellement issues des technologies à ultrasons et laser, le tout couplé à des systèmes informatiques de plus en plus puissants en termes d’acquisition de données. Gérer le stress Comme DEKRA Industrial, les entreprises d’inspection et de certification interviennent la plupart du temps durant les arrêts de maintenance et à l’issue de cette période critique. « Il s’agit de © Moretrench moments intenses dans la mesure où l’on attend beaucoup de nous. Avant le redémarrage des machines, nous vérifions si tous est bien conforme aux normes de sécurité. Si ce n’est pas le cas, l’entreprise risque de prendre beaucoup de retard et de perdre de d’argent. Cet enjeu repose sur la rentabilité de l’outil de production et génère inévitablement du stress. Or le stress fait perdre aux opérateurs une partie de leurs moyens et donc leur efficacité. Nous pensons donc qu’un environnement est hostile lorsqu’un ensemble d’éléments dégrade les relations humaines ». Olivier Guillon PRODUCTION MAINTENANCE NOVEMBRE 2013 PAGE 29