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Production Maintenance n°39

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Dossier spécial GMAO : les outils de la maintenance de demain

Tribune libre du

Tribune libre du zirconium, on peut penser que dans un délai qui n’excèdera pas un siècle, une crise des matières premières minérales est très probable. A moins que des techniques d’explorations minières sous marines redonnent de la perspective... Il nous faut donc revoir complètement notre manière de concevoir les nombreux objets qui facilitent ou agrémentent notre existence, pour tenir compte de cette contrainte qui ne pourra que s’accentuer dans l’avenir. Peut-être même faudra-til renoncer à certains de ces objets, s’ils se révèlent trop gourmands de ressources rares. Le problème posé est celui du prélèvement fait sur ces ressources non renouvelables (donc pour l’essentiel des minerais et du pétrole) pendant la totalité de la vie de l’objet considéré. Il existe un concept bien connu qui est le coût du cycle de vie (parfois désigné par le sigle LCC : Life Cycle Cost) et qui a un contenu et un objectif essentiellement financiers. L’intérêt du LCC dans un appel d’offres est de comparer, pour chaque fournisseur en compétition, ce que la possession d’un objet donné coûtera à son propriétaire, de sa conception jusqu’à son élimination incluse. Mais on peut aussi évaluer dans le même mouvement quel sera pour un matériel donné le prélèvement sur les ressources de la planète qui sera nécessaire pour sa construction, son utilisation, sa maintenance et son élimination. Si je prends le cas simple d’un véhicule automobile, ce coût écologique comprendra: les métaux divers, acier, alliages légers, cuivre , etc. les plastiques divers (venant du pétrole) pour l’habillage intérieur, le verre pour les pare brise et portières, tout cela consacré à la construction. Il comprendra également les matières de fonctionnement, pour l’essentiel le carburant, les produits nécessaires à la maintenance : lubrifiants, pièces de rechange, enfin les produits nécessaires à son élimination ou son recyclage. L’un des objectifs de l’étude d’un objet nouveau devra donc être de minimiser ce prélèvement. On voit ainsi arriver une nouvelle hiérarchie dans les objectifs d’un projet. L’objectif premier ne sera plus la performance, mais l’économie dans l’emploi des matériaux et la durée de vie du produit terminé, car ce qui comptera sera le rythme du prélèvement, c’est-à-dire le prélèvement total DR divisé par la nombre d’années de vie prévue... Si nous revenons à la voiture qui permet des exemples parlants, on peut déjà constater que les « Belles américaines » des années 50, aux noms prestigieux : Cadillac, Buick, Packard, énormes véhicules bardés de métal chromé et gouffres à essence, ont à peu près totalement disparu du paysage. Mais la performance numéro 1 reste bien évidemment la vitesse. Est-il raisonnable de construire des voitures capables de circuler à plus de 200 km/h, alors que dans de nombreux pays la topographie et l’état du réseau routier ne permettent pas de telles vitesses, et que dans les pays ayant un réseau routier de qualité, la loi limite souvent sévèrement la vitesse sur route, c’est le cas par exemple aux États-Unis ? Renoncer à des vitesses très élevées demandera de moins gros moteurs, économie de matières, et ralentira l’usure des voitures, augmentation de la durée de vie. On gagne à la fois sur le numérateur et sur le dénominateur dans le calcul du rythme de prélèvement. Et, bien sûr, on économisera de la précieuse essence... Dans le même état d’esprit, on peut aussi s’interroger sur la pertinence de certaines fonctionnalités accessoires à la fonction requise principale d’une voiture qui est de se transporter d’un point à un autre, lorsque ces fonctionnalités exigent des éléments rares dont la disparition risque d’être rapide. Là aussi, est-il raisonnable de demander à une voiture de faire ellemême un créneau, au prix de radars et de servo-mécanismes divers? Autrement dit, on va devoir simplifier la spécification d’une voiture, si on veut continuer à en construire beaucoup. D’où le succès des Logan et autres low cost … mais dans ce cas c’est la fin du haut de gamme et de l’industrie à la main d’œuvre chère… Il faut aussi, et c’est très important, mettre l’accent sur la maintenabilité qui est un élément essentiel de la durabilité. Mais mettre la simplicité en tête des caractéristiques recherchées ne suffit pas. Puisqu’on parle de développement durable il faut rechercher la durabilité, dont on a déjà parlé. Il faut dans la conception du matériel privilégier les solutions favorables à sa longévité. Il faut aussi, et c’est très important, mettre l’accent sur la maintenabilité qui est un élément essentiel de la durabilité. On doit également souligner que la maintenabilité suppose que le matériel à maintenir est démontable. Un objet non démontable qui tombe en panne est mort, il ne peut pas être réparé ni même recyclé. L’article indémontable devrait être pros - crit, et l’article jetable réservé aux usages médicaux, quand on ne peut pas faire autrement.) La maintenance doit être aisée, en particulier pour les composants à durée de vie limitée et donc sujets à remplacement périodique (voir l’excellent contre exemple des phares de Renault Modus où, pour changer une ampoule grillée, il faut déposer le pare choc). Et naturellement, un des éléments qui faciliteront ce remplacement sera leur normalisation : de nombreux matériels informatiques sont maintenant alimentés en basse tension continue, et chacun possède son alimentation propre. Ne serait-il pas préférable de normaliser un nombre limité d’alimentations pour ne pas avoir à racheter une nouvelle alimentation chaque fois qu’on remplace son PRODUCTION MAINTENANCE ➤ OCTOBRE, NOVEMBRE, DÉCEMBRE 2012 ➤ PAGE 76

Tribune libre ordinateur ? (Un exemple particulièrement frappant est celui des téléphones portables où jusqu’à présent pour chaque téléphone il fallait son alimentation spécifique, d’où de par le monde un nombre astronomique de chargeurs comprenant chacun quelques grammes de cuivre et quelques grammes de silicium, mais à des milliards d’exemplaires, cela finit par faire des tonnes, et même des milliers de tonnes. Depuis deux ou trois ans, il y a un standard mini USB pour les chargeurs de smartphone. On l’a déjà dit plus haut : il faudra aussi suivre de près la situation des minerais considérés comme en voie de disparition, et rechercher la manière la plus sobre de les utiliser, ou trouver des substituts moins rares. La dernière étape dans la vie d’un matériel est son retrait du service, et dans la situation décrite en commençant, ce retrait du service est une étape qui doit être prise en considération au stade du projet. Les composants du matériel doivent en effet être au maximum recyclés, et d’autant plus, naturellement, que leur valeur est plus grande et qu’ils sont plus rares. Il faut par exemple que les matériaux précieux, genre terres rares ou autres métaux exotiques fréquents dans les équipements informatiques, soient bien localisés et aussi faciles que possible à retirer et à stocker, en attendant leur réemploi. Avec les batteries Lithium ou autre, les quantités sont encore plus grandes et le recyclage est une obligation. Il est important de noter que ce concept du développement durable dans lequel la maintenance tient une place importante peut jouer un jouer un rôle majeur sur le plan social. Augmenter la durée de vie d’un matériel par une maintenance attentive permet d’économiser le prélèvement sur les ressources non renouvelables de la planète grâce à davantage de travail humain. On créée donc une demande de main d’œuvre non délocalisable, car il y a des matériels qu’on ne pourra pas facilement, ou même pas du tout, transporter ailleurs pour leur maintenance, et il est très probable par surcroît que les coûts de transport deviendront de plus en plus dissuasifs (on n’imagine guère que le prix du pétrole puisse réellement diminuer sur la longue durée). On aurait ainsi un exemple vertueux d’une DR activité qui serait en même temps bonne pour l’environnement et favorable pour l’emploi. Naturellement, ce processus exigera du temps, car il faudra changer les mentalités : au bureau d’études sur la manière de concevoir un matériel nouveau, à l’atelier pour ne pas gaspiller des matériaux qui deviendront de plus en plus précieux, chez l’utilisateur qui devra apprendre à ménager son équipement (le Canonball est l’exemple parfait du comportement à proscrire). Et naturellement il faudra des hommes capables d’exécuter ces tâches, sinon nouvelles , du moins très différentes dece qu’elles étaient jusqu’à présent. Et plus que jamais il faudra des scientifiques: des mathématiciens, des informaticiens, des physiciens, des chimistes, des ingénieurs, alors que l’on constate une diminution très nette du nombre d’étudiants dans les filières scientifiques. Pour terminer un exemple provocant. On pourrait prendre pour symboles des deux manières de concevoir un matériel : d’une part une voiture de formule 1, pour laquelle on déploie des trésors d’imagination pour concevoir un véhicule, capable de circuler à très grande vitesse durant quelques heures, en transportant une seul et unique personne sans bagages, et qui d’ailleurs parcourt inlassablement un circuit fermé, si bien qu’à la fin de la journée elle est toujours au même endroit, d’autre part, une locomotive électrique dont la durée de vie est de l’ordre de trente à quarante ans pendant lesquels elle aura parcouru cinq millions de kilomètres ■ Henri Arnoux - Afim PRODUCTION MAINTENANCE ➤ OCTOBRE, NOVEMBRE, DÉCEMBRE 2012 ➤ PAGE 77

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